La chasse au chargé de mission
La période actuelle, plus que tout autre, voit les français s’intéresser au budget de l’Etat et à la façon dont ce dernier dépense l’argent.
Il est vrai que la crise financière que nous traversons depuis 2007 et plus particulièrement celle de la dette des Etats qui se déchaine depuis 3 ans a mis à la Une de nombreux sujets économiques. Alors certes les français sont nuls en économie (ce n’est pas moi qui le dit mais le CREDOC qui vient de réaliser une étude à ce sujet) mais ils essaient tant bien que mal de s’intéresser et d’apporter leur pierre au débat.
Le gouvernement lui le sait bien et joue sur les mots pour faire passer la pilule. Par exemple quand il lance une deuxième plan “d’économies” en trois mois, personne ne bronche, pas même les journalistes généralistes qui doivent être aussi nuls en économie que la population générale. En effet, aucune économie dans le double plan Fillon mais des recettes nouvelles, un poids de l’impôt accru, pour êtres surs de garder cette peu enviable place de leader mondial.
Alors oui à quelques mois de la présidentielle, tailler dans les dépenses serait peut être suicidaire d’un point de vue politique, d’où cette concentration des efforts sur les recettes (impôts) et non pas sur les dépenses, mais cela serait salutaire d’un point de vue économique.
Comme l’écrivait il y a quelques jours Charles Dereeper ici, il parait impossible pour l’Etat de couper dans ses dépenses, c’est à dire grosso modo de réduire le poids de la fonction publique. Comme d’habitude il s’est fait copieusement incendier dans les commentaires.
Il y a aujourd’hui un fait incontournable, l’Etat dépense beaucoup plus que ses moyens ne lui permettent. Quand ce mécanisme est répété chaque année, cela créé une dette énorme et nous projette dans cette fameuse crise, les prêteurs se faisant réticents à prêter à des “paniers perçés”.
Le levier numéro un, comme dans tout bon ménage ou entreprise responsable, serait évidemment de couper dans les dépenses. Et c’est là que les problèmes commencent !
Dès que l’on évoque cette piste, c’est une volée de bois vert teintée d’une mauvaise fois et d’une hypocrisie incroyable : “allez-y, détruisez l’hôpital, nous ne serons plus soignés”, “vous voulez que vos enfants soient mal formés à l’école ?”, “plus de policiers dans les rues pour notre sécurité ? ” etc. etc. à chaque fois la même rengaine et le même florilège.
Evidemment que non, tout le monde, même les plus libéraux, souhaitent des écoles de qualité, de bons hôpitaux, une sécurité des citoyens, etc. Tout le monde est prêt à payer pour cela, c’est l’essence même de l’Etat de nous donner ce cadre de vie.
Mais si les plus ardents défenseurs de la fonction publique mettent cela en avant, c’est pour mieux masquer les emplois publics qui ne servent à rien et dont on ne parle jamais. En somme, l’arbre qui cache la forêt de la gabegie publique.
Les collectivités locales, dont l’empilage donne le vertige : communes, intercommunalité, départements, régions, etc. C’est là que se situe un gaspillage sans nom, sans contrôle et qu’on évoque que trop rarement.
16% du budget de l’Etat est dédié aux collectivités locales, celà représente le deuxième poste de dépenses derrière l’enseignement et la recherche. Accessoirement c’est une première ligne de 60 milliards d’euros à laquelle s’ajoute les couches d’impôts locaux qui viennent encore abonder ce trou sans fond.
L’Etat semble avoir perdu tout contrôle sur ces institutions, gérées localement et bien souvent par des roitelets qui manient le chéquier comme personne. Les visées électorales sont l’objectif numéro un et on ne compte plus dans ces trous noirs de la dépense publique les fils ou fille d’un tel, les amis d’un autre, les emplois bidons pour rendre service, les dépenses pharaoniques de locaux qui ne cessent de s’agrandir. Des scandales, il y en a dans toutes les régions de France et on le compte plus.
Le plus fantastique dans ces organismes ce sont les fameux “chargés de mission”. Le poste qui ne veut rien dire par définition, pourtant on en compte des milliers. Tout le monde est chargé de mission là dedans mais personne ne sait ce qu’ils font. J’ai moi même passé les 10 mois de mon service national au sein d’un conseil général et j’ai donc vu de l’intérieur la productivité des “chargés de mission” et autres “chargés de communication” et bien elle est nulle, plus de la moitié des postes ne sont pas justifiés. Oh ils font bien un tableau Excel de temps en temps, ce sont des experts dans le domaine, mais pour quoi, pour qui, pour quel résultat et surtout pour quel service rendu aux administrés ? Aucun !
Si Nicolas Sarkozy a taillé légèrement dans les effectifs de la fonction publique depuis son arrivée, les collectivités locales ont de leur côté créé le double d’emplois et elles continuent à recruter à tour de bras, comme si la crise de la dette ne les concernaient pas. Et qu’on ne mette pas en avant le fameux “transfert de compétence”, car pour un poste décentralisé, les collectivités locales en créent deux, voir trois.
Il est urgent de reprendre la main sur ce qui est aujourd’hui le plus gros gaspillage d’argent public en France. Le levier est énorme car on se situe sur le deuxième poste de dépenses de l’Etat. Des réductions de coûts d’au moins 20% sont envisageables avec à la clef des dizaines de milliards d’euros de vraies économies pour le coup. L’impact sur la croissance du pays serait nul à la différence du relèvement permanent des impôts (directs ou indirects) qui brident la consommation et l’investissement des entreprises.
Rodolphe Vialles